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Rabi’ al-Awwal : le mois de l’Amour

 

 

 

 

L’islam. Quel cadeau est l’islam ! Lumière sur lumière. Événement après événement. Pour nombre d’entre nous, ramadan est un mois intense et unique spirituellement, car c’est bien sûr le moment le plus propice pour se rapprocher d’Allah. Les ouvertures et les bénédictions n’y ont pas de fin. Le neuvième mois : une renaissance. Or ce n’est pas le seul moment de l’année, il y en a d’autres et le mois de rabi’ al-awwal en est un. C’est aussi un mois pair ; le troisième de l’année islamique. Il est pour beaucoup le mois de la lumière et de l’amour, le vrai amour. Celui qui est là pour rester, quelles que soient les épreuves et les circonstances. Il y a plusieurs sortes d’amour : les frileux, les peureux, les tièdes, ceux qui sont intenses pour une durée limitée puis disparaissent, ceux qui durent, mais s’essoufflent, ceux qui perdurent malgré les tempêtes, les douloureux, ceux qui demandent beaucoup d’efforts et enfin ceux qui progressent avec le temps et donnent beaucoup de fruits. Celui-là ne fait pas de mal, au contraire, que du bien et il n’est pas difficile à se concrétiser : qui peut ne pas aimer le Prophète lorsqu’il a appris à le connaître ? L’amour pour notre Prophète est la sève de notre vie. Il nous a tout appris, nous a guidés patiemment vers la lumière. Il exhalait l’amour et la sagesse, le sourire et la douceur. Il ne repoussait pas, ne faisait pas de mal, pardonnait les faux pas avec patience, consolait, parlait le langage unique des hommes, des femmes et des enfants. Il est un père aimant, notre éducateur spirituel, notre racine, notre lien à Allah. C’est un amour que l’on doit entretenir quoi qu’il se passe. Tous ceux qui sont entrés dans cette religion pourront dire que la vie en compagnie du Prophète a une toute autre dimension. Elle devient douce même dans les moments amers. Elle est enfin pourvue d’oxygène et d’un noble but qui est de se rapprocher d’Allah. Nous sommes enfin accrochés au câble de la « vraie » vie. La lumière de l’islam se propage par les efforts de la oumma alhamdoulillah, néanmoins nous avons tout autant besoin de la lumière du Prophète pour vivre l’islam de la plus pure des manières.

Qu’est-ce qu’un mawlid [1] ? Ce sont des vers chantés qui relatent la vie du Prophète souvent accompagnés de tambourins. Le mawlid est une très ancienne pratique. L’Imam as-Suyuti du Caire (quinzième siècle) رحمه الله en avait déjà parlé dans ses ouvrages et avait même rédigé une fatwa en faveur de cette commémoration. La grande poétesse et érudite de la langue arabe ‘Aicha al-Ba’ouniya de Damas (seizième siècle) رحمها الله a écrit des mawalid et de nombreuses éloges en l’honneur de la naissance du Messager de Dieu . Il est aussi intéressant de savoir qu’elle mentionne dans l’un de ses ouvrages (al-Mawrid al-Ahna), que lorsqu’elle était à la Mecque, elle entendit un homme réciter un mawlid un vendredi soir en face du Haram, et elle eut une vision du cher Moustafa juste après. Il y a bien d’autres exemples.

Dans le monde musulman, rabi’ al-awwal est un mois de bonheur et de festivités. À Tarim, il y a des mawalid plusieurs fois par jour, de jour comme de nuit. C’est comme être plongé dans un océan d’amour et de bien-être, il n’y a pas d’autres préoccupations que d’être enveloppé par la lumière du mawlid ! Le Prophète se trouve réellement présent parmi nous, le cœur est soulevé. Nous sommes envahis par une joie et une allégresse particulières, qui n’ont pas leur pareil dans d’autres occasions. En Jordanie, il y a des mawalid tous les jours, dans les centres, les maisons et les mosquées du nord au sud du pays. Il y a aussi des animations pour les enfants. Le centre al-Hawra à ‘Amman organise des visites dans les hôpitaux et le douze ils ont distribué des cadeaux aux nourrissons nés ce jour-là ainsi qu’à leurs mamans. Ils organisent également des activités caritatives en faveur des orphelins, des veuves, des démunis, etc… Cela continue jusqu’à rabi’ ath-thani. En Indonésie, les mawalid ne s’arrêtent pas durant ces deux mois que ce soit en plein-air, dans les écoles ou les centres etc… Ils prennent des dimensions gigantesques !

Les actions ne manquent pas pour faire le bien et diffuser l’amour que l’islam nous donne, mais que bien trop souvent nous ne savons redistribuer. Que l’on soit seul ou accompagné, on peut tous lire ou écouter la sira, faire des mawalid des salawat, des anachid, des compétitions de poèmes, donner, aider, offrir des cadeaux régulièrement, faire une liste de sounan à piocher quotidiennement, s’éloigner des disputes, pardonner, etc… C’est le mois de notre guérison, de notre bien-être. Les salawat font des miracles, guérissent, apaisent. Elles nous apportent une paix intérieure. Cette paix que nous invoquons sur le Prophète nous revient. C’est tellement beau… La pollution interne se dissipe et laisse place à la lumière. Le dernier Messager a atteint le meilleur degré que l’on se souvienne de lui ou pas. L’amour qu’Allah lui porte n’est pas entre nos mains. En revanche, nous, nous sommes dépendants de la source d’amour qu’Allah met à notre disposition à travers Son Prophète .

Cette paix que nous invoquons sur le Prophète ﷺ nous revient. Share on X

Qu’Allah illumine nos cœurs par cette lumière et améliore nos caractères. Qu’Allah nous fasse entrer dans Son firdaws et partager les majalis du Prophète et des Sahaba رضي الله عنهم. Amen. Quelle magnifique compagnie ! Nous l’avons tant désirée dans cette dounya, mais n’avons pu y accéder. Ce serait un cadeau incroyable. Oui… être en présence de la meilleure création, cela n’a pas de prix, et pourtant seulement notre amour est requis.

Maryam Szkudlarek


Notes : 

[1] Les livres sont nombreux. Habib ‘Umar a écrit plusieurs mawalid, mais il y en a beaucoup d’autres et cela depuis des siècles.

Souhaiter « Jumu’a Mubarak »
est-ce une innovation ?

 

 

 

 

Pour quelques tristes raisons, les gens demandent sans cesse de préciser si le fait de souhaiter un « Jumu’a Mubarak » (Vendredi Béni ou bon vendredi) est une innovation [1]. Cet article, inshaa’ Allâh, permettra d’avoir un éclairage sur ce sujet.

 

Question :

Récemment, j’ai visionné une vidéo sur YouTube dans laquelle un homme affirme que se souhaiter mutuellement un « bon vendredi » est une innovation? Est-ce vrai?

 

Réponse :

Les Savants spécialisés dans le domaine de la fatwā (les avis juridiques) ont divisé les actes entre culte et coutumes. Les deux sont au cœur de notre foi et les savants ont accordé à chacun une attention considérable. Pour cette raison, le premier doctorat accordé par l’université al-Azhar dans les années 20 portait sur l’Islam et la coutume.

 

Les coutumes et les cultures sont embrassées par l’Islam

 

La coutume est si importante qu’elle constitue l’un des cinq principaux axiomes de la loi Islamique. Al-Qādi al-Hussein ash-Shāfi’i رحمه الله a écrit : « L’utilisation de la coutume est l’un des cinq principes sur lesquels repose le droit Islamique ».

L’Imām as-Suyyuti رحمه الله les a mentionnés dans Al-Kawāqib al-Sāt’i :

« La certitude n’élimine pas le doute et l’Islam supprime tous les dommages.
La difficulté apporte la facilité et la coutume (pour le fiqh) est un point de référence
Quelques-uns en ont ajouté un cinquième : chaque acte d’une personne est basé sur son intention. »

 

Le rôle de la coutume dans la Fatwa

 

ʻAbdullah ibn Masūd رضى الله عنه avait pour habitude de dire : « Ce que les Musulmans jugent comme étant bon est bon. »

Dans la collection de hadiths authentiques de l’Imam al-Bukhāri (dires ou traditions du Prophète ﷺ), sous le chapitre dédié au commerce, nous trouvons un titre intéressant pour la 95ème section :

بَابُ مَنْ أَجْرَى أَمْرَ الأَمْصَارِ عَلَ مَا يَتَعَارَفُونَ بَيْنَهُمْ فِي الْبُيُوعِ وَالإِجَارَةِ وَالْمِكْيَالِ، وَالْوَزْنِ، وَسُنَنِهِمْ عَلَ نِيَّاتِهِمْ وَمَذَا هِبِهِمِ الْمَشْهُورَةِ

(Nom du) Chapitre : Lorsqu’il n’y a pas de jugement fixe, il est fait référence aux traditions et usages d’une communauté ; Les coutumes et les normes sont une partie importante de notre foi.

En commentaire, le grand Imam ibn Hajar رحمه الله a écrit : « Le but de ce titre est d’établir le recours à la coutume dans le droit Islamique ».

Cela ne veut pas dire que toute coutume est reconnue par l’Islam. Ainsi, pour en savoir plus à ce sujet, il est recommandé de consulter un spécialiste local ou les livres de usūl al-fiqh (fondements de la Jurisprudence Islamique).

 

La règle concernant les coutumes et les affaires courantes est la licéité

 

L’Imām Ibn Taymiyyah رحمه الله a écrit que les fondements de l’école de l’Imam Ahmed sont au nombre de deux :

1. Les coutumes sont autorisées sauf s’il existe un texte clair les interdisant.

2. Il est interdit d’inventer des actes de culte à moins qu’un texte clair ne le permette.

Ensuite, il a défini la coutume en ces termes : « Les coutumes sont les habitudes des gens en matière de nourriture, de boissons, de vêtements, de transport, de conversation et autres activités quotidiennes normales. Ainsi, elles ne devraient être interdites que par Allâh ou Son Messager par le biais d’un texte explicite, général ou d’une analogie appropriée. Sinon, la règle générale à leur égard est la licéité ».

À partir de la définition donnée par Ibn Taymiyyah, nous comprenons que les coutumes se divisent en deux parties : les paroles et les actes.

Ibn Hajar a déclaré : « La coutume joue un rôle dans la détermination du sens explicite des mots. » Cela implique que si une personne utilise un mot qui est exclusif à sa culture, la coutume connue est utilisée pour en déterminer ses implications. Pour cette raison, l’imam ad-Dardīr رحمه الله a fait remarquer que les Mālikites avaient formulé l’axiome suivant : « Les coutumes sont comme des conditions ». Les salutations comptent parmi les usages importants des mots.

 

Les salutations

 

Les érudits s’accordent pour dire que les salutations relèvent des mu`amalāt (activités quotidiennes) et font partie des coutumes liées à la parole. Dès lors, les salutations exemptes de tout mal sont considérées comme licites. Pour cette raison, quand Talha رضى الله عنه (un grand compagnon du Prophète ﷺ) a salué K`ab رضى الله عنه avec la bonne nouvelle du pardon de ce dernier, celui-ci n’a pas été censuré par le Prophète, K`ab ou par les autres compagnons (qu’Allah soit satisfait d’eux tous).

Sur la base de ce principe important et du grand nombre de textes généraux qui nous encouragent à bien parler et à être doux avec les autres, il est exagéré de dire qu’une telle salutation est une innovation. Pour ceux qui veulent approfondir le sujet, l’Imām ash-Sakhāwi رحمه الله (grand maître de hadith et étudiant principal de l’éminent maître dans cette discipline, l’imam Ibn Hajar al-Asqalani) a noté cela plus en détail dans al-Tahina bi alsh-Shūr wa al-Ayad (Les Salutations pendant des mois et les vacances).

Par ailleurs, il est rapporté dans des récits bien authentifiés et solides que notre Prophète ﷺ nous a appris que le jour de Vendredi est un ‘Aïd (jour de fête) pour les Musulmans. [2]

Nous savons que, tout comme l’Aïd, le Vendredi est un jour qui renferme de grandes bénédictions – un jour où nos œuvres sont acceptées, nos péchés sont pardonnés et nos prières exaucées.

l’Imam Sakhawi considérait que l’exemple général des Compagnons se félicitant mutuellement lors des occasions bénies constituait un précédent suffisant pour que les Musulmans puissent le faire également au cours de mois spéciaux et des « ‘Aïds » (ce qui inclus le vendredi, comme établi par de solides rapports Prophétiques).

Enfin, notons que le fait de dire « Jumu’a Moubaraka », revient à dire « que Allâh bénisse ton Vendredi ». Cette phrase n’est donc rien d’autre qu’une invocation (dou’a) formulée par un Musulman envers un de ses coreligionnaires. Il n’y a en cela rien de blâmable, quand bien même la formulation précise n’aurait pas été prononcée par le Prophète ﷺ ou un de Ses Compagnons. Cela constitue un acte de piété et nous demandons qu’Allâh accepte nos pieuses invocations, ainsi que les vôtres.

À la lumière de ce qui précède, il apparaît qu’il n’y a rien de mal à féliciter son compatriote Musulman le Vendredi avec une phrase telle que « Jumu’a Moubarak ». En tant que « phrase », elle est peut-être certes nouvellement inventée, mais en tant que « signification », elle coïncide parfaitement avec le point de vue Islamique du Vendredi et de ses mérites.

Enfin, Si vous souhaitez lire un exposé détaillé sur le concept de l’innovation (bida’a) en Islam, nous vous recommandons de l’article suivant : Existe-t-il de bonnes innovations en Islam

Qu’Allah nous bénisse par le tawfiq (succès).

Et Allâh est plus Savant

Wassalam

 

Notes :

Réf : Imam Suhaib Webb, Sheykh Faraz Rabbani, Sidi Faraz A. Khan

[1] Sous entendu, une « mauvaise » innovation.
[2] Ibn Majah, Sahih Ibn Hibban

Mawlid Salafis

 

 

Le Mawlid des Salafis

 

Prophète Muhammad : BIDA’A !
Mohamed ibn ‘Abd al-Wahhab : HALAL !

 

 

 

BismiLlâhi ar-Rahman ar-Rahim,

Comme nous l’avons vu dans nos articles dédiés au Mawlid [1], nos frères (dits) Salafis s’opposent violemment à la commémoration de la naissance de notre bien aimé Prophète, Saydunna, Habibuna, Nabiyyuna, Mawlana Muhammad, Rassul Allâh (salaLlâhou ‘alayhi wasalaam). Dans leur grande majorité, les savants Sunnites ont vu dans cette commémoration une très bonne innovation (bida’a hassana) [2] et la plupart des grands savants ont d’ailleurs autorisé et encouragé ces célébrations [3] faites de réjouissance, de récitation du Qour’an, de Dhikr, de Sama’a, de Salawats, etc.

Pour donner un exemple de ces mises en garde contre le Mawlid, il suffit de regarder dans les ouvrages des références de la Salafiyya, comme ce livre de Bin Baz (rahimahuLlâh) intitulé « Tahdhir mina al bida’a » (mise en garde contre les innovations) où il écrit [4] :

« Commémorer la naissance du Messager d’Allâh (Mawlid) ne fait pas partie de l’Islam mais plutôt des innovations que Allah et son Messager ont ordonné de délaisser et dont il faut se méfier, il ne convient pas à celui qui est raisonnable de se laisser tromper par le grand nombre de gens qui le font partout dans d’autres pays. Parce que la vérité ne se fait pas à partir du grand nombre de ceux qui le pratiquent. »

Dans sa « fatwa », Bin Baz déclare clairement que le Mawlid est célébré partout dans le monde et par un très grand nombre de personnes, mais pour lui le nombre de Musulmans (et parmi eux bien entendu les savants) s’étant mis d’accord ne semble pas compter, malgré les nombreux hadiths qui accordent une grande importance sur le fait de rester accroché à la majorité [5].

Tandis qu’il condamnent fermement ceux qui osent commémorer la naissance du Prophète Muhammad (salaLlâhou ‘alayhi wasalaam), la meilleure créature d’Allâh, envoyée comme miséricorde pour l’Humanité [6], ces mêmes Salafis ne voient aucun problème à commémorer une semaine entière la naissance de leur maître à penser Mohamed ibn abd al-Wahhab (rahimahuLlâh), fondateur de la Wahhabiyya, groupe minoritaire en marge du monde Musulman Sunnite traditionnel.

Bizarrement, lorsqu’il s’agit de Mohamed ibn abd al-Wahhab, cette commémoration ne tombe plus sous l’appellation d’innovation interdite qui mène en enfer, mais devient soudainement une très bonne chose, comme si finalement leur définition de l’innovation ne s’appliquait que lorsqu’il est question de montrer son amour pour le Prophète Muhammad. Comme l’a si bien dit Sheykh Yahiya Rhodus : « Il n’existe pas de meilleur moyen pour détruire le Deen que d’éloigner la Ummah du Prophète ».

Ainsi, voici ce que déclara Bin Baz à l’occasion de cette semaine dédiée à commémorer la naissance de Mohamed ibn abd al-Wahhab :

« Chers frères, chers organisateurs de cette semaine, je me suis langui de votre rencontre et de ma présence parmi vous […] je remercie la famille royale, l’émir Salman fils de ‘Abdou l-‘Aziz, Émir de la région de Riyad pour sa participation à la cérémonie d’ouverture, tout comme je remercie les frères participants pour l’organisation de cette semaine, pour leurs efforts et leur collaboration. » [7]

Surprenant non? On pourrait nous rétorquer que c’est un avis isolé, mais nous allons voir que d’autres ténors de la Salafiyya ont tenu exactement la même position. Ainsi, voici ce qu’a déclaré Ibn ‘Utheymin (rahimahuLlâh) dans un de ses ouvrages intitulé « Fatawa al-‘Aqidah ».

Pour rappel, Ibn ‘Utheymin fait aussi partie de cette poignée de gens qui ont déclaré que la fête du Mawlid est une bida’a (dans le sens de la mauvaise innovation) et que c’est haram (interdit) [8], ce qui sous-entend au niveau de la Shari’ah que ceux qui le font auront mérité d’être châtiés par Allâh et que ceux qui s’en seront abstenus auront mérité d’être récompensés pour s’en être abstenus. Si Ibn ‘Utheymin considère tout à fait normal et légitime qu’un Musulman soit châtié pour s’être réjouit de la naissance du Prophète Muhammad, il ne voit par contre aucun mal à ce que les Musulmans commémorent la naissance de Mohamed ibn Abdal Wahhab et qu’ils en soient récompensés par Allâh dans l’au-delà.

Ainsi, lorsqu’on lui a posé la question sur la différence qu’il peut y avoir entre cette semaine entière consacrée à Mohamed ibn Abdal Wahhab et la commémoration de la naissance du Prophète, il a déclaré :

« Premièrement la semaine de Mohamed ibn Abdal Wahhab, n’est pas considérée comme un acte par lequel on recherche l’agrément d’Allâh. Mais c’est un acte pour lever le doute que certaines personnes peuvent avoir à son sujet, et cela montre ce dont Allâh a comblé les Musulmans par cet homme. »

« Deuxièmement, cela n’est pas quelque chose de répétitif [9] Et ça ne se perpétue pas tout comme se perpétuent les fêtes, et c’est une chose qui est évidente chez les gens. Et c’est pour faire connaître cet homme, à beaucoup de gens, à ceux qui ne le connaissent pas. » [10]

On voit nettement vers qui est portée l’attention des shuyukh Salafis et qui mérite selon eux d’être célébré et connu. Pendant une semaine ils étudieront sans sourciller la sira de cet homme, mais ils condamneront fermement et sans détour ceux qui oseront faire la même chose pour la meilleure des créatures, le Prophète Muhammad (salaLlâhou ‘alayhi wasalaam), le bien-aimé d’Allâh.

Voilà comment d’un coup, ce qui selon la définition qu’ont les Salafis de la bida’a, devrait logiquement être sévèrement blâmé et considéré comme digne du châtiment Divin, devient par « magie » une bonne innovation pour laquelle on se languit et on se réjouit. ‘Ajib !

Je vous pose la question mes frères Salafis : Quelle naissance est donc la plus digne d’être célébrée, celle de Mohamed ibn abd al-Wahhab ou celle du Prophète Muhammad (salaLlâhou ‘alayhi wasalaam)? Qui d’entre ces deux hommes mérite le plus d’être connu, honoré et aimé des Musulmans?

Qu’Allâh nous préserve du sectarisme et augmente notre amour pour celui qui est digne, Mawlana Khayr ul-Khalq, Saydunna Muhammad (salaLlâhou ‘alayhi wasalaam).

 

♡♡♡ Allâhumma salli ‘ala Saydinna Muhammad wa ‘ala ‘alihi wa as-Sahbihi wa Sallim ♡♡♡

 

Notes :

[1] Voir notre dossier consacré au Mawlid
[2] Voir notre article consacré à la définition de ce qu’est l’innovation (bida’a)
[3] Voir notre article consacré aux savants qui ont autorisé la célébration du Mawlid
[4] Voir les scans ici : 1 – 2
[5] Voir notre article sur la nécessité de suivre le Groupe majoritaire (as-Sawad al-Azam)
[6] Qour’an : s21, v107
[7] Voir les scans ici : 123 – 4
[8] Voir les scans ici : 12 – 3
[9] Cette commémoration semble pourtant se répèter chaque année
[10] Voir les scans ici : 12

Ps : Notons que d’autres commémorations sont fêtées en Arabie Saoudite, comme par exemple la fête nationale qui célèbre la naissance du royaume. Voir ici et

 

Existe-t-il de bonnes innovations en Islam

 

 

bidaa

 

 

Alors que les savants Musulmans Sunnites acceptent la classification des innovations (bida’a) en bonnes et en mauvaises, certains nient malgré tout l’existence de bonnes innovations en Islam.

Cette poignée d’érudits Musulmans contemporains qui rejette l’existence de bonnes innovations cite pour argumenter leur avis ce hadith dans lequel le Prophète ﷺ a dit : « Méfiez vous de ce qui est innové ! Certes, toute innovation est une bida’a et toute bida’a est une déviation ». [Hadith rapporté par Abou Dawoud, at-Tirmidhy, Ibn Mâjah].

Ceux qui rejettent l’existence de bonnes innovations en Islam font mine d’ignorer ce qui a été dit à ce sujet par les plus grands savants de l’Islam. Ils préfèrent privilégier leur propre compréhension la faisant passer auprès des Musulmans comme étant celle des Pieux Prédécesseurs [radhia Allâhou ‘anhoum].

A titre d’exemple, l’Imam an-Nawawi رحمه الله explique que dans le hadith cité ci-dessus, l’adjectif « toute » est un terme général au sens restreint. C’est à dire que toute innovation qui est en contradiction avec la religion est rejetée, et non pas toute innovation dans l’absolu.

De la même façon, quand Allâh dit dans la sourate al-Ahqaf, versets 24 et 25 : « C’est un vent qui contient un châtiment douloureux qui détruit tout par ordre de Son Seigneur puis le lendemain, on ne voyait plus que leurs demeures ». Il est évident que ce vent n’a pas tout détruit, c’est-à-dire la totalité des choses puisque les demeures ont été épargnées.

L’adjectif « toute » est ici un terme général au sens restreint comme dans le hadith sur l’innovation.

On retrouve cette utilisation de l’adjectif « toute » dans de nombreux versets du Coran.

En voici quelques exemples :

« Pour ce qui est de la barque, elle appartenait à de pauvres gens qui travaillaient en mer. J’ai voulu lui donner l’apparence d’être défectueuse, parce que derrière eux il y avait un roi qui s’emparait de toute embarcation et l’usurpait ». [Coran – Sourate Al-Kahf, verset 79]

Il est ici évident que « toute » désigne les barques neuves, en bon état. Sinon il aurait été inutile de donner une apparence défectueuse à la barque.

Aussi, quand Allâh a ordonné à Noé [‘alayhi salam] d’embarquer « dans l’arche un couple de toute espèce […] ». [Coran – Sourate Al-Mu’minun 23:27]

Cela signifie un ensemble limité d’espèces car il est évidemment impossible d’emporter les milliards d’espèces qui peuplent la surface de la terre.

Cette utilisation de l’adjectif « toute » se retrouve également dans de nombreux hadiths.

En voici quelques exemples :

Le Prophète ﷺ a dit : « Soignez-vous en utilisant la graine de nigelle, c’est un remède contre toutes les maladies à l’exception de la mort ». [Hadith rapporté par Bukhari, Muslim, at-Thirmidhi, ibn Majah et Ahmad au travers de 19 chaines]

Les commentateurs sont unanimes pour dire que cela ne signifie par pour autant que la graine de nigelle (haba sawda) soigne toutes les maladies. Là encore le hadith a un sens spécifique et restreint. Ainsi le terme « toute » désigne « de nombreuses » maladies.

Le Prophète ﷺ a dit : « Tout ce par quoi le musulman se divertit est bâtil, sauf le fait qu’il tire à l’arc, qu’il entraîne son cheval, ou qu’il joue avec son épouse : ces (actions) relèvent du haqq ». [Hadith rapporté par at-Tirmidhî et cité qualifié de Sahih dans Ihya Uloom ud-Din de l’Imam al-Ghazali, vol 2]

L’Imam al-Ghazali écrit : « Cela ne signifie pas que toute chose, à l’exception des trois citées est illégale, cela signifie simplement que les autres choses sont exemptes de récompenses. Pour autant s’amuser à faire le doux chant des oiseaux ou jouer à n’importe quel autre sport pour le plaisir n’est pas illégal ». [Dans l’Ihya page 171]

Qu’il s’agisse du Coran ou des Hadiths, on retrouve bien cette même utilisation du mot « toute » dont la portée est générale mais dont le sens est restreint.

Lorsque l’on étudie de près le sujet de l’innovation, on note également que les détracteurs oublient fréquemment de citer le hadith suivant dans lequel le Prophète a dit :

« Si quelqu’un instaure dans l’Islam une bonne tradition (sounnah hassanah), il en aura la récompense et aura une récompense chaque fois que les gens la referont après lui sans que rien ne soit diminué de leurs récompenses. Mais si quelqu’un instaure dans l’Islam une mauvaise tradition (sounnah sayyi’ah), il se chargera de son péché et sera chargé d’un péché chaque fois que des gens la referont après lui sans que rien ne soit diminué de leurs péchés ». Ce Hadith authentique est pourtant rapporté par les Imams Muslim, at-Tirmidhî, al-Nasâ’î, Ibn Mâjah, et d’autres.

Comme expliqué ci-dessus, les savants des quatre écoles sont depuis toujours unanimes sur la classification des innovations (bida’a) en bonnes (acceptées) et en mauvaises (rejetées).

Celle qui est bonne est celle qui ne contredit pas la Shari’ah et permet de faciliter les œuvres déjà prescrites et méritoires, tandis que la mauvaise innovation est tout ce qui est nouveau et contredit le Coran et la noble Sunnah.

Parmi les innombrables savants qui ont approuvés cette division, on peut par exemple citer l’Imam ash-Shafé’î qui a divisé l’innovation en deux parties, la première étant la « bida’a mahmûda »  (approuvée) et la seconde la « bida’a madhnûma » (désapprouvée).

Ainsi, il est rapporté par Abou Nou’aym que l’Imam ash-Shafé’i a dit : « L’innovation (bida’a) se divise en deux parties : Celle qui est louable et celle qui est blâmable. Tout ce qui est conforme à la Sunna est louable et tout ce qui s’y oppose est blâmable ».

De même, l’Imam Al-Bayhaqi rapporte dans son Manaqib, cette parole de ash-Shafé’i : « Les innovations sont de deux types : l’un est ce qui est innové et qui rentre en conflit avec le Livre, la Sunna, un rapport d’un Compagnon [athar] ou un consensus ; cette innovation est un égarement. L’autre  type est ce qui est innové à partir du bien et qui ne rentre pas en conflit avec quoi que ce soit de ce qui est précédemment cité; il s’agit alors d’une innovation qui n’a rien de blâmable ». (Dans Manaqib, Tome 1, page 468)

L’Imam an-Nawawî رحمه الله , le grand savant commentateur du Sahih de Muslim, classe l’innovation en cinq catégories. Il a écrit dans son ouvrage Al-Qawa’id (Al-Kubrâ) : « L’innovation est divisée en celle qui est obligatoire (wâjiba), interdite (muharrama), recommandée (mandûba), déconseillée (makrûha) ou indifférente (mubâha). La manière de décider est d’examiner l’innovation à la lumière des règles de la Loi (qawâ’id al-sharî’a). Si elle tombe dans le champ des obligations (îjab), elle est donc obligatoire, si elle tombe dans le champ des interdictions, elle est interdite (tahrîm), dans le champ des recommandations, elle devient recommandée, déconseillé si elle concerne ce qui l’est et permise si elle touche aux permissions ».

L’Imam al-‘Izz ibn Abd as-Salâm رحمه الله (m. 660 h) surnommé le sultan des ‘Ulamas a écrit : « La bida’a, c’est un acte qui n’a pas été connu à l’époque du Prophète Muhammad, mais elle se divise en 5 catégories : obligatoire, interdite, recommandée, déconseillée, autorisée. »

Exemples d’innovations obligatoires rapportées par le grand savant al-‘Izz ibn Abd as-Salâm رحمه الله : Apprendre la science de la grammaire Arabe (pour comprendre et protéger la Shar’iah), écrire les fondements de la Jurisprudence (Usul al-Fiqh), créer une science de la critique des narrateurs/rapporteurs de Ahadith, réfuter les sectes (mu’tazilites, mujassimas, qadiriyas, mourji’a…) ou encore réciter le Qour’an en essayant d’avoir une belle voix, tout en changeant les lettres du Qour’an, etc.

Exemples d’innovations autorisées rapportées par le grand savant al-‘Izz ibn Abd as-Salâm رحمه الله : Avoir une armée pour défendre l’Islam et les Musulmans, inventer des écoles, construire des ponts et toute chose bienfaisante, prier Tarawih, parler des détails du Tasawwuf, etc.

Exemples d’innovations déconseillées rapportées par le grand savant al-‘Izz ibn Abd as-Salâm رحمه الله : Le fait de trop embellir les mosquées, le fait de trop dessiner sur les livres de Qour’an, changer les lettres du Qour’an dans la récitation parce qu’on essaye d’avoir une belle voix, etc. [1]

Quant à la sommité dans la science du Hadith, al-Hâfidh ibn Hajar al-‘Asqalani رحمه الله, il a déclaré : « La signification première de l’innovation est ce qui est produit sans précédent. Ce terme est employé dans la Loi par opposition à la Sunna, ainsi elle est blâmable. De manière précise, si elle fait partie de ce qui est classé comme désirable par la Loi, alors c’est une bonne innovation (hassana), tandis que si cela fait partie des actes blâmables, alors c’est une innovation blâmable (mustaqbaha), sinon elle tombe dans la catégorie de ce qui est permis (mubah). Elle peut être classée dans les cinq catégories connues ». [Fath Al-Bârî, tome 4, page 253]

De même l’Imam Ibn al-Athîr al Jazarî رحمه الله a dit dans son chef-d’œuvre, « al-Nihâya fî Gharîb al-Hadîth wal-Athar » : « L’innovation est de deux sortes : l’innovation de guidance et l’innovation d’égarement (bid’atu hudâ wa-bid’ati dalâla). Tout ce qui va à l’encontre des commandements d’Allâh et de Son Messager se trouve dans la sphère du blâme et de la condamnation. Et tout ce qui rentre dans ce qu’Allâh et Son Messager ont recommandé en général se place dans la sphère du mérite. Tout ce qui n’a pas de précédent comme l’extrême générosité ou l’extrême bonté sont des actes méritoires. Il n’est pas permis de dire qu’un tel comportement va à l’encontre de la Loi car le Prophète a stipulé qu’il sera récompensé quand il a dit : « Quiconque institue une bonne coutume en Islâm (man sanna fîl-islâmi sunnatan hassana) aura une récompense ainsi que celle de tous ceux qui l’auront suivi ». De même, il a dit : « Quiconque institue une mauvaise coutume en islam (waman sanna fîl-islâmi sunnatan sayyi’atan) recevra un châtiment ainsi que celui de ceux qui l’auront pratiqué ». Il s’agit des cas où l’acte contredit ce qu’Allâh et Son Messager ont commandé… C’est dans ce sens que le hadith « toute innovation est égarement » est compris : il signifie, tout ce qui s’oppose aux bases de la Loi et qui ne correspond pas à la Sunna ».

Voici quelques exemples d’innovations que les savants Musulmans ont acceptées comme étant bénéfiques et conformes à la Shar’iah Islamique :

1/ La prière de Tarawih en congrégation :

Amir al-Mu’minin, Saydunna ‘Umar رضى الله عنه, concernant la prière en groupe du Ramadân (Tarawih) :

 D’après l’imâm Mâlik, d’après Chihâb, d’après ‘Urwa Ibn Az-Zubair, d’après ´Abd ar- Rahmâne Ibn ‘Abd al-Qâri qui a dit : « Je suis allé avec ´Umar ibn al Khattâb (RA) une nuit de Ramadan à la mosquée et là, nous avons trouvé les gens dispersés dans leur prière, les uns priant individuellement et les autres priant les uns derrière les autres. Umar dit alors :

« Par Allah, je vois qu’il serait mieux que je rassemble ces gens-là derrière un seul récitant du Coran ».

Il les rassembla donc derrière Ubayy Ibn Ka’b رضى الله عنه. Je sortis avec lui une autre nuit nous vîmes les gens prier derrière un seul récitant. ‘Umar dit alors : « Excellente innovation que celle-ci ; cette [prière commune] qu’ils font – puis ensuite ils vont dormir – est préférable que celle qu’ils accomplissent [seuls] toute la nuit. »

L’imâm Al-Bayhaqi a dit : « Cet acte de l’émir des croyants « Umar Ibn al-Khattab », bien qu’il soit une innovation (bid’a), il n’en reste pas moins qu’elle est une innovation louable, car elle n’était pas contraire à ce qui se passait à l’époque du Prophète ﷺ. Nous avons rapporté plus haut que les musulmans faisaient ces prières derrière le Prophète ﷺ, mais ce dernier abandonna cette prière collective de crainte quelle ne leur soit imposée. Mais une fois que le Prophète ﷺ a rejoint son seigneur, et la religion accomplie de même que les obligations prescrites, Umar Ibn al-Khattâb رضى الله عنه n’eut pas la même crainte que le Messager d’Allah et vit que le fait de grouper tous les fidèles derrière un seul récitant est préférable que de les laisser dispersés. » [2]

A ce propos, l’Imam Ibn al Jawzi رحمه الله a dit au début de son Tablîs Iblîs : « Certaines nouveautés (muhdathât) ont été apportées qui ne s’opposent pas à la Loi Sacré, pas plus qu’elles ne la contredisent, ainsi, ils (les pieux prédécesseurs) n’ont pas vu de mal dans leur pratique, comme le fait que ‘Umar ait rassemblé les gens pour les prières nocturnes de Ramadân, après quoi il les a vus et a dit : « Quelle bonne innovation ! ».

On peut également citer le fait de réciter le Coran en entier dans le mois de Ramadan durant les prières de Tarawih. Cela n’a été fait ni par le Prophète ni par les Compagnons, ni par leurs successeurs.

2/ L’ajout d’une formule dans l’adhan du Subh :

Yahya m’a rapporté de l’Imam Malik رضى الله عنه qu’il a entendu que le Muezzin est venu vers Saydinna ‘Umar ibn al-Khattab رضى الله عنه pour l’appeler à la prière de Subh et qu’il l’a trouvé en train de dormir. Il lui dit alors : « La prière est meilleure que le sommeil » et Saydinna ‘Umar lui ordonna de mettre cette phrase dans l’Adhan du Subh. [3]

3/ L’ajout du 2ème appel à la prière le vendredi :

Dans le Sahih al-Boukhary figure un hadith authentique qui mentionne que saydinna ‘Uthman, qui était Khalif, a instauré un deuxième appel à la prière pour la prière du Vendredi. C’est en effet un acte qui n’a jamais été fait par personne avant lui :

« Le premier appel à la prière du vendredi avait lieu, à l’époque du prophète, d’Abou Bakr et de ‘Umar, après que l’Imam se soit installé sur la chaire. Mais à l’époque du calife ‘Uthmane, du fait que les Musulmans étaient devenus très nombreux, il demanda d’ajouter un troisième appel à la prière du vendredi ». [4]

Après que Hadrat ‘Umar Farouq ait fait la prière de Tarawih, il déclara : « Quelle excellente bida’a ». L’imam Abou Hanifa رضى الله عنهa dit qu’il s’agit là d’une preuve de la part des gens de science que celui qui invente une mauvaise action dans l’Islam recevra le péché pour lui-même ainsi que celui de qui le suit, tandis que celui qui invente un bonne Bidaa dans l’Islam recevra sa récompense et celle de tous ceux qui le suivront dans cette pratique. [5]

Ceux qui disent qu’il n’y a que des mauvaises innovations se limitent-ils pour autant à un seul appel à la prière le vendredi comme c’était le cas à l’époque du Prophète ?

4/ Faire ses ablutions pour transmettre les Hadiths :

L’imâm Ja`far as-Sâdiq faisait ses ablutions pour transmettre le Hadîth, pratique qui n’a été faite par aucun compagnon.

Ainsi, il est rapporté dans Kitâb ach-Shifâ : « J’ai (ndt : Mus`ab ibn ‘Abdullâh) vu également Ja`far ibn Muhammad as-Sâdiq, qui aimait pourtant plaisanter et rire, devenir pâle lorsqu’on mentionnait le Prophète et je ne l’ai jamais vu transmettre les Hadîths de l’Envoyé d’Allâh sans être en état de pureté ». C’est une pratique qui a été reprise par bon nombre de grands savants du Hadith.

Abû Mus`ib rapporte que Mâlik ibn Anas رضى الله عنه n’évoquait pas les Hadîths de l’Envoyé d’Allâh sans avoir fait auparavant ses ablutions mineures (wudhû) par respect pour lui.

Dhirar Ibn Murra et Qatâda disent que la majorité des gens de cette époque détestaient évoquer le Hadîth sans avoir fait auparavant leurs ablutions. [6]

5/ La réprobation de la transmission du Hadîth en étant debout :

Certains pieux prédécesseurs n’acceptaient pas que l’on transmette le hadith debout.

Ibn Mahdî rapporte ce qui suit : « Un jour, j’ai accompagné Mâlik en marchant jusqu’au ‘Aqiq. En cours de chemin, je l’ai interrogé sur un Hadîth. Il me réprimanda et me dit : ‘Tu étais à mes yeux suffisamment éminent pour ne pas interroger sur le Hadîth de l’Envoyé d’Allâh pendant que nous marchions.’ ».

On rapporte que Hishâm ibn Hishâm al-Ghazî a interrogé Mâlik sur un Hadîth pendant qu’il était debout. On lui administra vingt coups de fouet. Puis Mâlik eut pitié de lui et lui dicta vingt Hadîths. Hishâm dit alors : « J’aurais bien voulu qu’il me donne davantage de coups de fouet et qu’il me dispense davantage de Hadîths ». [7]

6/ Débattre avec les gens de l’innovation [ahl ul-bida’a] :

L’Imam Al-Bayhaqi a dit : « Débattre avec les gens de l’innovation – lorsqu’ils rendent leur hérésie publique où qu’ils soulèvent des insinuations – pour contredire leurs propos et exposer leurs erreurs est appréciable, même si c’est une innovation, car cela consiste à les réfuter. Le Prophète ainsi que certains Compagnons ont été interrogés à propos du Décret Divin (al-qadar) et leurs réponses nous ont été transmises. A cette époque, ils se contentaient des mots du Prophète, ensuite des narrations rapportées à cet effet. Mais de nos jours, les innovateurs ne se contentent plus de telles réponses, pas plus qu’ils ne les acceptent. Ainsi, il est devenu nécessaire de réfuter leurs insinuations – lorsqu’elles deviennent publiques – avec ce qu’ils considèrent eux-mêmes comme des preuves ». Les Imams An-Nawawi, Ibn ‘Asâkir, Ibn al Salâh, as Subkî, Ibn ‘Âbidîn et d’autres soutiennent cet avis. [8]

7/ La ponctuation du Coran :

L’imam al-Ghazzâli a dit sur sa discussion concernant le fait d’ajouter la ponctuation au texte du Coran : « Le fait que cet acte soit innové (muhdath) n’est en rien un obstacle. Combien de pratiques innovées sont excellentes ! Comme il a été dit concernant l’établissement de la prière de Tarawih en groupe, c’était une nouvelle pratique instaurée par ‘Umar et c’était une excellente innovation (bid’a hassana). L’innovation blâmable est uniquement celle qui s’oppose à la Sunna ou qui mène à la changer ». [9]

8/ Le fait d’écrire « Salallâhou ‘alayhi wassalam » après avoir mentionné le nom du Prophète :

Ce sont bien les savants qui ont innové le fait d’écrire « Salallâhou ‘alayhi wassalam » après la mention de son nom. A l’époque du Prophète, les gens ne le faisaient pas. D’ailleurs, le Prophète ne l’a pas fait lorsqu’il a envoyé des lettres aux rois et aux gouvernants de la terre. Il disait simplement : « De Muhammad le Messager d‘Allâh ». Les lettres que le Messager a dictées aux compagnons et qui étaient envoyées aux rois, tels que Héraclius ne comportent pas la mention « Salallâhou ‘alayhi wassalam ».

On peut lire dans le Sahih de l’Imam Al-Boukhary, une transcription d’une de ses lettres qui confirme cela :

بسم الله الرحمن الرحيم من محمد عبد الله ورسوله إلى هرقل عظيم الروم السلام على من اتبع الهدى

« Bismillâh ar-Rahman ar-Rahim min Muhammadin ‘abdillâhi wa rassoulihi ‘ila Hiraqla ‘adhimi r-roum salamoun ‘alamani t-tabba al-houda »

Ce qui signifie :

« Je commence par le nom d’Allâh le Tout Miséricordieux, le Très Miséricordieux, de Muhammad fils de ‘Abdullâh et Son Messager, à Héraclius l’empereur des Romains, que la paix soit sur celui qui emprunte le chemin de guidée ».

L’ajout de « Salallâhou ‘alayhi wassalam » est une bonne sounnah que les savants ont innovée et que le Prophète n’a jamais faite.

9/ Le Mawlid an-Nabawi :

Une très large majorité de savants Sunnites l’ont autorisé. Ils ont encouragé les Musulmans à honorer la mémoire du Prophète Muhammad en participant à cette noble commémoration.

Parmi eux, As-Suyuti, al-‘Iraqi, al-Qastalani, as-Subki, ad-Dimasqhi, al-Haytami, ibn Hajar al-‘Asqalani, ibn al-Jawzi, ibn Taymiyya, ibn Kathir, ibn al-Qayyim al-Jawziyya, etc.

Lire à ce propos : L’avis des savants sur la commémoration de la naissance du Prophète Muhammad [al-Mawlid]

10/ La collecte de Hadith dans des livres :

Recueillir les Hadiths sous forme de livre et stipuler la chaîne ou les narrateurs et caractériser les hadiths en disant qu’il est Sahih, Hassan ou Da’if, Mu’addaal ou Mudallas, etc. et établir les avis juridiques avec l’aide de Hadiths Makruh, Mustahab, etc, toutes ces pratiques relèvent de l’innovation appréciable et n’ont jamais été pratiquées dans la période bénie de Rasoul Allâh.

Qu’il s’agisse de Bukhari, Muslim, at-Tirmidhi, Abou Dawoud, etc. aucun des livres de Hadiths Sahih que nous prenons en considération n’ont été compilés par le Prophète. Faire de tels recueils et les suivre comme étant la voie du Prophète est une Bida’a. Cela n’a jamais été fait par les Salafs, mais recueillis plus tard par les savants du Hadith.

11/ Les Sciences Islamiques :

Les sciences Islamiques telles que nous les connaissons aujourd’hui n’existaient pas à l’époque du Prophète. Ainsi les Fondements du Hadith (Usul al-Hadith) ou de la Jurisprudence (Usul al-Fiqh) sont des innovations. Ce sont pourtant des sciences reconnues de tous les savants Musulmans et dont l’Islam ne peut aujourd’hui se passer.

12/ Les lieux d’apprentissage des Sciences Islamiques :

La construction de Madrassas et d’Universités Islamiques pour l’apprentissage de la Shari’ah est une innovation.

13/ Dans les Mosquées :

L’édification de minarets, l’utilisation de Mirhab, les mosaïques, les tapis pour prier, les hauts parleurs pour l’adhan, etc. Il s’agit encore là d’innovations.

14/ Durant le mois de Ramadan :

L’utilisation du télescope pour apercevoir la « nouvelle lune », l’annonce du début et de la fin du jeûne de Ramadan à la radio et à la télévision, l’utilisation de la sirène à l’Iftar, etc.

15/ On peut encore citer en vrac :

L’utilisation de qualificatifs pour les degrés de science, comme par exemple « Mufti », les calendriers avec les heures de prière, l’étude approfondie de la langue Arabe (essentielle pour l’apprentissage des Sciences Islamiques), les compétitions de récitation du Coran, etc..

Malgré le fait que les prédécesseurs et les savants qui leur ont succédé aient pour la majorité fait cette distinction entre ce qui relève de la bonne et de la mauvaise innovation, certains viennent aujourd’hui remettre ce fait en cause et tentent d’imposer leur opinion contraire comme étant la seule valide. C’est une preuve d’ignorance et de sectarisme et cela constitue sans l’ombre d’un doute une innovation des plus blâmables.


Notes :

[1] Imam ‘Izz al-Din ibn ‘Abd al-Salam dans Qawa’id al-Ahkam

[2] Rapporté d’al-Rabî` par al-Bayhaqî dans son Madkhal et Manâqib ash-Shâfe`î (1:469) avec une chaîne authentique comme le dit Ibnou Taymiyya dans son Dâr’ Ta`ârud. al-`Aql wa al-Naql (p. 171) et à travers al-Bayhaqî par Ibn ‘Asâkir dans Tabyîn Kadhib al-Muftarî (Kawtharî ed. p. 97). Cité par ad-Dhahabî dans le Siyar (8:408), Ibn Rajab dans Jâmi` al-`Ulûm wal-Hikam (p. 267=Zuhaylî ed. 2:52-53=Arna’ût ed. 2:131 sahîh), et Ibn Hajar dans Fath al-Bârî (1959 ed. 13:253).

[3] Muwatta de l’Imam Malik ~ Livre n°3, Hadith #154 – qu’Allâh soit satisfait d’eux tous

[4] Rapporté par l’Imam Ash-Shafé’î dans son Mousnad, par l’Imam Ahmed, par l’Imam Al-Boukhary, par l’Imam Abu Dawoud, ainsi que d’autres Imams.

[5] Imam Ibn Hajar Al-‘Asqalani dans Zubda tul-Fakr

[6] et [7] Al- Qadi ‘Iyad dans Kitâb ash-Shifâ

[8] Al-Bayhaqî, Manâqib al-Shâféi`î (1:469)

[9] Al-Ghazzâlî, Ihyâ’ `Ulûm al-Dîn (1:276)

Sur ce même sujet, nous vous recommandons également de regarder cette série de 3 cours donnée par Sheykh ‘Abd Allâh Penot :

Pt. 1 : https://youtu.be/lYmsR5gr-hI
Pt. 2 : https://youtu.be/LIgvG9hrZkw
Pt. 3 : https://youtu.be/wUYFHfwcWS4
Pt. 4 : https://youtu.be/8mn_820vrdc

Est-il permis de fêter les anniversaires?
 

Par le Mufti  Muhammad ibn Adam al-Kawthari [1]

 

 

islam anniversaire

 

 

Au nom d’Allâh, le Très Clément, le Très Miséricordieux,

De manière générale, les anniversaires ne sont pas quelque chose qui devrait être célébré ou pour lequel nous devrions nous réjouir. Quand c’est l’anniversaire de quelqu’un, ca signifie qu’il reste à cette personne un an de moins à vivre, et non le contraire. Comme tel, quelle logique y a-t-il à célébrer et à montrer son bonheur alors qu’il reste à cette personne une année de moins à vivre?

Avant de pouvoir comprendre l’avis Juridique concernant les fêtes d’anniversaire, il est utile de rappeler ici que l’imitation des non-musulmans (Kuffar) est quelque chose que l’Islam réprouve strictement.

Dans un Hadith rapporté entre autres par l’imam Abu Daoud, le Messager d’Allâh (salallâhou ‘alayhi wasasalaam) dit :

« Celui qui imite un peuple en fait partie ». [2]

Il convient de rappeler ici que tout ce que les non-Musulmans portent ou font n’est pas forcément Haram ni illégal. L’imitation qui est interdite, est celle qui entre dans le cadre de l’un des deux points suivants :

  • a) Quand une personne fait quelque chose avec l’intention d’imiter les non-Musulmans, ce qui signifie qu’elle le fait parce qu’elle veut ressembler à l’un ou à l’ensemble d’entre eux.
  • b) Quand une personne fait quelque chose qui est propre et spécifique aux  non-croyants ou qui fait partie de leur foi. Ce sera également considéré comme de l’imitation, donc illicite (Haram). [3]

À la lumière de ce qui précède, il existe différents statuts en ce qui concerne le statut Juridique (Shari’a) de la célébration des anniversaires :

1) S’il est célébré en imitant certaines ou toutes les coutumes propres aux non-Musulmans, ou que des actes interdits dans la Shari’ah y sont commis, il n’y a alors aucun doute quant à son illicéité. L’allumage des bougies sur un gâteau servant à dénombrer le nombre d’années écoulées, le fait de souffler dessus, l’écoute de la musique, les chants, les dépenses exagérées et immodérées, se donner en spectacle, etc – toutes ces choses sont des pratiques illégales et interdites. Ainsi, si on fête les anniversaires en adoptant les coutumes citées ci-dessus, alors cela ne sera pas permis.

2) Si les actes blâmables mentionnés ci-dessus sont évités, alors il y a deux possibilités :

  • a) Si l’on fête les anniversaires avec l’intention d’imiter les non-Musulmans ce qui signifie qu’on veut être comme eux, alors, comme indiqué précédemment, cela sera considéré comme une imitation des Kuffar, donc illicite.
  • b) S’il n’y a pas d’intention d’imiter les non-Musulmans (et que les mauvaises manières mentionnées ci-dessus sont également évitées), alors l’avis concernant la célébration des anniversaires dépendra du fait que cette fête trouve ou non son origine dans les coutumes religieuses des non-Musulmans et fait partie de leur foi. (La célébration d’anniversaire ne peut pas être considéré comme propre aux Kuffar, car cette pratique est devenue un phénomène généralisé qui est effectuée dans de nombreuses et différentes régions du monde). Personnellement, j’ignore si la célébration des anniversaires à un lien avec la foi Chrétienne ou une autre croyance, pour cette raison je suis incapable de donner un jugement décisif.

Toutefois, j’ai mentionné sur quel critère l’avis devra être basé. Si les origines de fêtes d’anniversaire sont liées à une croyance particulière, alors leur illicéité ne fait aucun doute. Si, toutefois, il n’a aucun lien avec la foi des non-Musulmans, alors (et Allâh est plus Savant), il semble qu’il serait permis de les célébrer (à condition que les mauvaises manières ci-dessus soient évitées).

3) Si l’on remercie Allâh et qu’on montre de la gratitude pour avoir bénéficié d’une année de vie supplémentaire, qu’on exprime ainsi le bonheur et la joie, alors il n’y en cela rien de mal. [4]

Et Allâh est plus Savant.

Muhammad ibn Adam al-Kawthari
Darul Iftaa, Leicester, Royaume-Uni

 

Notes du traducteur :

[1] La biographie du Sheykh est disponible ici : Biographie de Mufti Muhammad ibn Adam al-Kawthari

[2] Sunan Abu Dawud

[3] Voir la fatwa du Sheykh Mufti Taqi Usmani

[4] Voir : al-Fatawa al-Rahimiyya (Urdu), (6 / 320)